lundi 22 mai 2017

PROFESSEUR AMOA URBAIN PARLE A DRAMANE OUATTARA

LETTRE OUVERTE DU PROFESSEUR AMOA URBAIN À OUATTARA DRAMANE ALASSANE
Excellence, Monsieur le Président de la République,
Permettez- moi, d’entrée de jeu, de préciser que la présente lettre ouverte n’a pas pour objet de venir auprès de Votre Excellence pour quémander ou solliciter un poste. Permettez- moi de vous dire que vous semblez avoir atteint le summum de vos performances au sommet de l’Etat et que, par conséquent, l’heure de la démission a sonné : ce serait un acte de courage et de bravoure. Une bonne partie de la population ivoirienne saluerait cette décision par un tonnerre d’applaudissements, cette fois-ci, sans que vous le quémandiez comme vous le fîtes le 1er mai 2017 au Palais présidentiel. Une partie du peuple de Côte d’Ivoire attend de vous une démission, sinon le trésor par vous, amassé en Eburnie, sur cette terre de nos ancêtres qui pleurent sur vous, ne servira que pour votre défense au soir de votre « très brillante et illustre» carrière politique de guerres fratricides aux relents d’«ingouvernabilité».Comme vous l’avez compris, je voudrais ici engager un débat hautement intellectuel dans un style ainsi choisi et ce n’est pas un jeu d’enfant. En pareilles circonstances, un proverbe mossi nous donne la leçon de sagesse suivante : quand deux couteaux se battent, le coq et la poule se tiennent loin du champ de bataille. C’est aussi le lieu de rappeler que certaines études sur la psychologie de l’enfant indiquent qu’il est important d’accorder à un enfant qui pleure peu, autant d’attention qu’à un enfant qui pleure sans cesse.
Excellence, Monsieur le Président de la République,
Au moins trois leçons de vie nous interpellent tous en ces heures chaudes et, comme Emile Zola dans l’Affaire Dreyfus, je ne saurai observer un silence qui pourrait nous être tous fatal. La première consiste dans l’idée que nul n’a éternellement le monopole de la violence. La seconde pourrait se résumer en ces termes : qui crache en l’air la tête levée au ciel, finit tôt ou tard, par recevoir le crachat projeté par lui-même, en plein visage. Quant à la troisième, elle prend sa source dans la célèbre fable de La Fontaine intitulée : « Le lion et le moucheron », rappelant ainsi que toute victoire est éphémère et que l’Humain doit se laisser, pour éviter l’humiliation, habiter par l’humilité. Ces trois leçons de sagesse s’appliquent parfaitement à l’actualité et à l’histoire politique de la Côte d’Ivoire.
Excellence monsieur le Président de la République,
c’est bien vous qui, pleurnichant et gémissant toujours loin d’ici et souventes fois à partir des chaînes des Radios et Télévisions internationales, avez humilié toute la classe politique de la Côte d’Ivoire y compris Monsieur Henri Konan Bédié, en faisant croire qu’elle n’était pas suffisamment compétente pour la gestion des affaires publiques et que vous appreniez si vite que vous pourriez la supplanter en un laps de temps. C’est encore vous qui, tout en affirmant que nous avions toutes les compétences pour conduire un jugement honorable en Côte d’Ivoire, avez, tout de même, laissé se poursuivre le procès de S.E.M. Laurent Gbagbo à la Cour Pénale Internationale. Et c’est aussi vous, vos sponsors et peut-être sûrement une partie de vos adversaires politiques d’alors, qui avez instrumentalisé les jeunes que nous appelons tous honteusement « mutins » ou « microbes » et que vous voulez diaboliser sans remords. Pardon à vous jeunes qui avez sacrifié vos études et votre jeunesse pour les intérêts d’un individu en quête permanente de vengeance et bonjour Dame Ingratitude ! Puissent ces jeunes retenir hélas! que même avec des centaines de milliards encore, vous ne sauriez leur rendre cette noble partie de leur enfance et de leur jeunesse gâchée pour vous suivre dans les labyrinthes obscurs d’une mort brutale en masse et en cascade savamment programmée par vos soins. C’est donc vous qui, toute votre vie, devez les payer et non l’Etat de Côte d’Ivoire. Le cacao de nos parents planteurs, qui, dans nos villages et nos campagnes jouissent d’une gouvernance de proximité pilotée avec intelligence par une chefferie dite traditionnelle digne et encore très respectée, n’y est donc pour rien. Et si par malheur pour vous, vous faites faire le contraire, sachez que plus jamais la paix, ici-bas, ne vous habitera car les forces armées loyales (gendarmerie, police, douane, agents des eaux et forêts et autres militaires) qui ont défendu la Patrie ont, elles aussi, droit aux butins de guerre .Les fonctionnaires et les entreprises privées qui ont subi les affres des pillages, aussi. Vous voyez, à présent, qu’il ne s’agit plus d’un Sud qui serait venu d’un Océan inconnu pour assassiner un Nord en provenance du Sahara et vice versa, avec des Soldats chrétiens venus du Vatican contre des soldats musulmans en partance pour la Mecque. Et encore une autre leçon de sagesse: le mensonge a beau courir un an, la Vérité le rattrape en un jour.
Excellence, Monsieur le Président de la République,
rappelez-vous que vous avez été Directeur général adjoint au FMI (et vous nous l’avez déjà trop souvent rappelé d’ailleurs) mais que vous n’étiez pas Directeur Général ; que vous avez été Premier Ministre mais sous la très haute autorité de S.E.M Félix Houphouët- Boigny à qui vous avez, fort gentiment, donné un coup de pied au lendemain de votre élection à la Magistrature suprême, non seulement en ne vous installant pas à Yamoussoukro comme vous l’auriez-vous-même annoncé mais en signant, au Conseil des Ministres du 18 janvier 2012, une Ordonnance pour dissoudre la structure créée en 2002, chargée de coordonner les activités du transfert des institutions de la République, d’Abidjan à Yamoussoukro, dénommée : « Programme Spécial du Transfert de la Capitale à Yamoussoukro ( PSTCY)». Méchanceté, mensonge ou ingratitude ? A présent, vous êtes, et vous semblez l’oublier, le Président d’une grande nation qui somnole peut-être, mais qui ne dort pas, et vous voilà, face à l’ingouvernabilité et ployant vous-même sous le poids des mutineries orchestrées en amont par vous-même. A présent, ce sont vos compétences managériales et vos valeurs humaines intrinsèques qui sont, ici, sollicitées et non la culture de la haine ni un triomphalisme de meeting, et c’est encore là où le bât blesse ! A présent, et vous êtes sans doute le seul à pouvoir nous le dire, quels sont donc aujourd’hui, votre vraie ligne politique et votre plan de gouvernance pour votre propre parti politique, pour la Côte d’Ivoire et pour votre propre « émergence », ou peut-être votre totale et définitive immersion voire noyade politique à l’horizon 2020 ? Pitié pour ce Grand technocrate élégant et rigoureux, exceptionnellement coopté pour venir redresser l’économie ivoirienne d’alors, que l’on admira en vous… sous le parapluie de S.E.M. Félix Houphouët- Boigny! Et si mes propos venaient à vous choquer, vous me feriez tuer peut- être, mais peut- être pas ma liberté d’expression ni mes idées qui, déjà, parcourent le monde ; à ma suite, vous en feriez tuer d’autres et vous nous y avez, déjà, si éloquemment habitué mais jamais vous ne pourriez faire tuer toutes les ivoiriennes et tous les ivoiriens qui vous observent et vous regardent dans le silence de la peur, de la terreur et de l‘horreur. Merci à vous pour cette danse politique simiesque et macabre !
Excellence Monsieur le Président de la République,
Que choisir entre la Grande honte qui vous ferait honteusement partir de la Côte d’Ivoire pour la Haye, peut-être, et une Petite honte qui s’appellerait : «démission» quoique l’une n’empêche pas l’autre?
Et puisque, aux jeunes qui sont allés à votre école et que vous diabolisez sans honte aujourd’hui vous avez offert des machettes non pour travailler dans les plantations mais pour tuer des ivoiriennes et des ivoiriens, remettez- leur des machettes et apprenez- leur à cultiver des champs ! Et puisque vous leur avez remis des fusils pour leur apprendre à détruire les biens des citoyennes et des citoyens mais surtout, des vies humaines, redonnez- leur des fusils et apprenez-leur à défendre et à protéger la Nation ivoirienne et ses richesses ! Et puisque le maniement professionnel des armes est un métier, et que tous ne pourront y réussir, dé-diabolisez-les et faites ouvrir pour eux et pour tous ces jeunes en quête d’emplois, des Centres régionaux de civisme et de formation professionnelle, d’éducation populaire et de Corps de Volontaires pour la Paix et la Reconstruction nationale dont le pilotage serait assuré par des jeunes cadres qualifiés et compétents que pourraient accompagner nos meilleurs retraités riches d’expériences encore valides et capables d’enseigner avec intelligence la Côte d’Ivoire aux ivoiriens et aux amis de la Côte d’Ivoire.
Et puisque votre règne aura été fortement marqué par un esprit de haine, d’injustice et de désordre un parfait indicateur d’échec, même sur le terrain de l’économie, peut-être pourriez-vous retenir que pillage n’est pas synonyme de croissance et que le développement intégral et humain, sans une parfaite connaissance de l’histoire des peuples, sans fondement culturel et sans une claire conscience de sa responsabilité, n’est qu’illusion et dérision. Enfin, monsieur Alassane Dramane Ouattara (ADO) et non « AO !» (Alassane Ouattara), une interjection de désolation dans certaines langues ivoiriennes, retenez et retenez-le bien : quand dans une cour royale – mais ce n’est pas le cas ici – les Sages, les Conseillers et les devins lâchent sous la dictée des oracles le Roi, c’est que, et il faut vous en souvenir, le Ciel sur la personnalité qui exerce le pouvoir est gorgé de nuages sombres et d’une pluie diluvienne chargée de malédictions. L’esprit de nos ancêtres vous observe. Nous aussi. Souvenez-en et que vive « Ma Côte d’Ivoire qui ose et qui gagne! »
Et si après avoir lu la présente lettre ouverte vous vous demandiez encore pourquoi en juin 2016 j’ai osé observer malgré les menaces de vos balles assassines, loin de tout parti politique, une grève de la faim de trois jours au pied de la Basilique Notre Dame de la Paix de Yamoussoukro, je vous répondrais que cela n’aura été qu’un acte de prévention de conflits et que l’effet recherché était loin de vous inviter à me proposer, comme pour m’humilier ou me corrompre, une somme de 2,000,000 FCFA (deux millions de francs CFA). J’ose croire que dans votre propre conscience d’humain, donc de «roseau pensant » comme l’écrit Pascal au XVIIème siècle, vous n’ignorez tout de même pas que je pèse un peu plus que cela et que sans doute aurais-je davantage pesé si j’avais reçu une infime partie de votre triste et célèbre onction accordée à un seul de vos mutins adulés et choyés qui, souvenez-vous en, reviendront incessamment à la charge avec d’autres armes, pour davantage interroger votre conscience hélas !déjà si chargée de mille et une lueurs de sang. Dieu fasse que, malgré tout, par démission peut- être (mais quand et comment ?), vous puissiez jouir d’une bonne fin de mandat !
À Votre Excellence, monsieur le Président de la République, ma parfaite et très respectueuse considération.
Urbain AMOA Directeur du Festival International de la Route des Reines et des Rois- Abidjan